Taupier Rhône

Pourquoi les taupes font elles des galeries ?

Une vraie taupinière, ça commence sous terre

Si vous avez déjà marché sur une pelouse soudainement molle ou découvert un monticule de terre fraîchement retournée dans votre jardin, vous avez probablement rencontré une galerie de taupe. Mais pourquoi ces petits mammifères creusent-ils autant ? Est-ce juste pour nous compliquer la vie ? Pas vraiment.

Les galeries sont au cœur du mode de vie des taupes. Elles ne creusent pas pour le plaisir ou la décoration, mais bien par nécessité. Comprendre les raisons exactes de ce comportement permet non seulement de mieux anticiper leur présence, mais aussi de choisir les bons moyens pour les tenir à distance.

Une question de survie : la chasse au menu du jour

La première raison qui pousse la taupe à creuser des galeries, c’est l’alimentation. Contrairement à l’image qu’on peut avoir, la taupe ne mange pas les racines de vos plantes. Elle est insectivore. Ce qu’elle recherche à travers son réseau souterrain, ce sont des vers de terre, des larves d’insectes, et parfois quelques œufs de coléoptères.

Et ces galeries ne sont pas n’importe quel tunnel au hasard : elles sont des pièges alimentaires. Quand un ver tombe dans une galerie, il se retrouve coincé – et la taupe, en bonne chasseuse, n’a plus qu’à venir le chercher. Certaines galeries dites « temporaires » servent justement à quadriller une zone et augmenter les chances de capturer des proies.

D’après mes propres observations sur le terrain, une taupe peut ingérer jusqu’à l’équivalent de la moitié de son propre poids par jour en nourriture. C’est énorme, et ça explique pourquoi elle doit sans arrêt agrandir ou entretenir son réseau de galeries. Pas de galeries, pas de repas.

Un abri stratégique contre les prédateurs

Autre raison souvent sous-estimée : la galerie, c’est aussi sa maison et surtout, son bunker. Le monde extérieur est rempli de dangers pour la taupe. Hérissons, renards, rapaces, serpents… les prédateurs sont nombreux, et la taupe, avec sa mauvaise vue, n’a pas vraiment la cote niveau défense.

Ses tunnels lui offrent une protection optimale. D’autant plus qu’ils ne sont pas tous à la même profondeur. En moyenne, les galeries dites « de surface » – celles qui soulèvent la terre et qu’on repère facilement – servent surtout à la chasse. Les « galeries profondes », situées bien en dessous (jusqu’à 30 ou 40 cm), sont plus stables : c’est là qu’elle dort, stocke sa nourriture et élève ses petits.

C’est un peu comme une maison bien divisée : cuisine au rez-de-chaussée, chambres à l’étage inférieur. Sauf qu’ici, tout est sous vos pieds.

Des galeries pour stocker ses vivres

On l’oublie souvent, mais la taupe ne mange pas tout de suite ce qu’elle chasse. Elle stocke. Oui, elle a même un garde-manger ! Et pour cela, elle a besoin d’un espace dédié, à l’abri des variations de température et de l’humidité : encore une bonne raison d’étendre régulièrement son réseau de galeries.

Les vers sont parfois mordus juste à l’avant, de manière à les immobiliser mais sans les tuer. Résultat ? Des réserves vivantes prêtes à être consommées plus tard. Ce comportement a été plusieurs fois constaté dans des galeries explorées après dégagement.

Alors si vous pensiez que la taupe vit au jour le jour, détrompez-vous : c’est une vraie planificatrice !

Un territoire à marquer et à défendre

La taupe est un animal territorial. Chaque individu occupe une surface bien définie qu’il défend activement contre ses congénères. Ses galeries ne sont donc pas seulement des outils de chasse ou des abris, ce sont aussi des frontières.

D’ailleurs, vous pouvez parfois constater, dans certaines zones, une multiplication de taupinières sur une courte période. Cela peut traduire l’arrivée d’un nouvel individu ou une remise en cause d’un territoire existant. Les galeries servent alors à cartographier et à s’imposer dans la zone.

Dans mes interventions en zones agricoles ou périurbaines, j’ai souvent observé ce phénomène après des travaux de retournement de sol ou de tonte massive : les taupes redistribuent les cartes et redéfinissent leurs territoires.

Alors, pourquoi autant de taupinières en si peu de temps ?

Une question qui revient souvent sur le terrain : « Clovis, pourquoi tout a explosé en une semaine ? On dirait qu’elles sont 15 sous ma pelouse ! » Je vous rassure : c’est rarement le cas. En général, une seule taupe est capable de créer tout un réseau impressionnant de galeries et de monticules.

Pourquoi ce coup d’accélérateur ? Plusieurs raisons possibles :

C’est un animal discret, mais son activité peut devenir surprenante d’un jour à l’autre. Et contrairement à nous, elle ne prend pas de week-end.

Un réseau complexe qui évolue avec le temps

Les galeries ne sont pas fixes. Elles évoluent au fil du temps, en fonction des saisons, de l’humidité du sol, de la densité de proies, et même des dérangements humains (passage de tondeuses, présence d’animaux domestiques, etc.).

En hiver, la taupe va préférer les galeries profondes, plus stables et moins exposées au gel. Au printemps, elle va remonter vers la surface pour suivre la migration des vers stimulée par l’humidité. Ce sont souvent lors de ces périodes de « remontée » que les dégâts se multiplient à la surface.

Connaître cette dynamique permet d’anticiper les périodes d’activité plus intense et de choisir le bon moment pour intervenir.

Et les galeries verticales ?

Oui, elles existent aussi ! Les taupes ne travaillent pas qu’à l’horizontale. Elles creusent des galeries verticales pour relier les différents niveaux de tunnels. Ces conduits permettent des déplacements rapides entre les zones de chasse et les lieux de repos ou de stockage.

Ce sont souvent dans ces axes de liaison qu’elles intègrent leurs taupinières, poussant la terre vers la surface lors de l’excavation. Si vous repérez plusieurs monticules alignés, vous êtes probablement sur l’une de ces zones de connexion.

Peut-on repérer une galerie active ?

Bonne question. Tous les monticules ne sont pas forcément récents, et toutes les galeries ne sont pas forcément utilisées en continu. En revanche, certaines astuces permettent de savoir si une galerie est active :

Ces informations sont précieuses si vous envisagez une intervention : pièges, appâts, répulsifs… chaque méthode gagne à être placée sur une galerie fréquemment empruntée.

Un creusage instinctif, mais pas désordonné

On a parfois l’impression que les galeries partent dans tous les sens. Pourtant, il y a une logique derrière ce labyrinthe. Les taupes savent exactement où elles se déplacent, et leur mémoire spatiale est excellente.

Elles structurent leur réseau en zones de chasse, refuges, couloirs rapides, et points de stockage. Rien n’est laissé au hasard. Et c’est bien ce qui les rend si complexes à déloger : elles maîtrisent leur environnement au centimètre près.

Si vous cherchez à agir efficacement, comprendre cette logique est essentiel.

Et maintenant, que faire avec cette info ?

Connaître les raisons qui poussent les taupes à creuser des galeries permet de mieux anticiper leur comportement. Cela aide aussi à adopter des méthodes de lutte plus ciblées et plus raisonnées.

Plutôt que de paniquer à la vue d’une taupinière, posez-vous les bonnes questions : le sol est-il riche en nourriture ? Est-ce la saison de reproduction ? Y a-t-il eu un changement dans l’environnement ? Une fois les déclencheurs identifiés, vous serez à même de choisir l’approche la plus efficace.

Comme toujours, gardons une chose en tête : la taupe n’est pas un nuisible par méchanceté. Elle agit selon ses besoins. À nous d’agir selon les nôtres… intelligemment, et de préférence avec un bon plan en main.

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